Illusions d'optique : interprétations erronées d'une donnée sensorielle.

L'image "physique" formée au fond de l'oeil, analysée point par point, puis transmise au cerveau sous forme de messages codés est en principe la même pour tous.
Ce sont les zones visuelles du cerveau qui analysent ces signaux et nous donnent une représentation de l'objet perçu.

L'interprétation qu'en fait le cerveau peut parfois être ambiguë. Ces "erreurs" d'interprétation sont des illusions d'optique, qui ne sont pas perçues de la même façon par chacun d'entre nous (nous n'avons pas tous le même "vécu", ni les mêmes images en mémoire)...

Les illusions sont les témoins des mécanismes de la vision. Elles confirment que notre perception du monde est assez éloignée de la photographie. Elle est le résultat :

- d'une stimulation des photorécepteurs rétiniens, qui peuvent subir des phénomènes de fatigue.

- et surtout d'une construction mentale, à partir des messages nerveux reçus, parfois erronés. Le cerveau cherche à mettre du sens partout, même là où il n'y en a pas. Alors, il en fait trop, amplifiant les contrastes, créant contours, couleurs, perspectives, reliefs, mouvements, en fonction de ce qu'il connaît. En effet, malgré une organisation générale commune du cortex visuel, les apprentissages et le vécu diffèrent d'une personne à l'autre, d'où une sensibilité variable à certaines illusions.

 

Explications des illusions optico-géométriques :

Ce sont des illusions formées par des figures géométriques qui donnent lieu à des erreurs d'estimation, de dimension, d'interprétations, de courbure, de direction...

Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, des pionniers de la psychologie expérimentale, comme Delboeuf, Hering, Müller-Lyer et plusieurs autres ont découvert une grande variété d’illusions dites optico-géométriques auxquelles ils ont laissé leur nom. Au total plus de 200 illusions géométriques ont été répertoriées.

illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion de Muller-Lyer
La ligne du haut paraît plus courte que celle du bas.

On considère généralement qu’une illusion géométrique comporte deux éléments :

- un élément "inducteur"qui provoque la déformation

- un élément "test" qui la subit.

Par exemple, dans la figure de Müller-Lyer (à gauche), les pointes de flèche sont l’élément inducteur et les traits horizontaux, l’élément test.
Dans la figure de Poggendorff (à droite), les lignes verticales sont l’élément inducteur et les segments obliques, l’élément test.

illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion de Poggendorff
Le segment oblique inférieur (à gauche) ne paraît pas dans l’axe du segment oblique de droite, alors que physiquement ils sont dans le même axe.


Depuis plus d'un siècle nous avons proposé plusieurs explications pour les illusions géométriques mais les plus convaincantes s’accordent sur trois points importants.

D'une part, les illusions sont du domaine perceptif et n’ont rien à voir avec la pensée ou le raisonnement. En effet, nous savons que la plupart de ces illustrations sont des illusions géométriques, mais cela ne nous empêche pas de percevoir des déformations.

Ensuite, les illusions ne naissent pas dans la rétine ; elles apparaissent presque aussi nettement lorsque l'élément inducteur est placé devant un oeil et l'élément test devant l’autre oeil. Elles prennent donc naissance dans le système visuel, là où convergent pour la première fois les informations en provenance de chaque oeil.

 

A. CLASSIFICATION DES ILLUSIONS OPTICO-GÉOMÉTRIQUES :

 

1) La mise en relation de grandeur :
De nombreuses illusions produisent une mise en relation de grandeur des éléments de la figure. Il en résulte généralement un effet de contraste : la grandeur apparente des éléments les plus grands est surestimée par comparaison au plus petit et inversement. Le cas le plus évident est sans doute l’illusion de Titchener (à droite). On a cependant invoqué à certains moments le principe d’assimilation suivant lequel, lorsque les différences sont minimes entre les plus grands et les plus petits éléments, on a tendance à minimiser ces différences. Il s’ensuit une assimilation d’un élément test à un élément inducteur plus grand (donc un surestimation de l’élément test) ou plus petit ( donc une sous-estimation de l’élément test), alors que le contraste apparaît lorsque la différence entre l’élément inducteur et l’élément test est plus importante.

illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion de Titchener
Le cercle central de la configuration de gauche paraît plus grand que celui de la configuration de droite.

 

2) La courbure des arcs de cercle :
illusion © Ophtasurf, 2003
Courbure des arcs de cercle
Les trois lignes semblent avoir des courbures différentes, alors qu’elles ont la même courbure.

La courbure des arcs de cercle varie en fonction de leur longueur. Les arcs court sont vus plus plats que les arcs longs.

 

3) Les effets d'angles :
illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion de Hering
Les lignes horizontales semblent incurvées, alors qu’elles sont physiquement droites et parallèles.
Les illusions dues à des effets d’angles sont très nombreuses et elles sont sans doute parmi les plus spectaculaires. Les scientifiques se sont appuyés sur deux principes pour les expliquer.
Tout d'abord, nous avons tendance à sur-estimer les angles aigus et a sous-estimer les angles obtus. Nous avons qualifié ceci de principe d’orthogonalité, étant donné qu’il s’agit dans chaque cas d’une tendance à ramener l’angle vers un angle droit. Ce principe permet d’expliquer facilement les illusions de Zöllner (à droite) et de Hering (à gauche), mais il peut aussi s’appliquer à l’illusion de Poggendorff et à celle de Müller-Lyer (voir plus haut). Dans l'illusion de Zöllner, les lignes nous paraissent déformées à cause des petites lignes qui forment le graphisme secondaire.
Le second principe concerne la tendance que l’on a à sur-estimer les côtés d’un angle obtus et à sous-estimer ceux d’un angle aigu. Dans ce cas, l’illusion de Müller-Lyer pourrait encore servir d’exemple.
illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion de Zöllner
Les lignes obliques ne semblent pas parallèles, alors qu’elles le sont.

 

4) La verticalité :
Une ligne verticale paraît plus longue qu’une horizontale de même longueur car le mouvement des yeux qui est lié aux lignes horizontales est plus facile à exécuter qu’un mouvement vertical.
L’exemple le plus fréquemment cité est le T inversé (à droite), mais il faut noter que cette forme donne lieu à des effets d’illusion compétitfs parce que, en plus de la surestimation liée à la verticalité, il y a un effet de contraste de grandeur produit par la mise en relation entre la verticale et chaque segment de l’horizontale. On obtient un vrai effet de la verticalité en utilisant plûtot la figure en forme de L.
illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion de la verticale
La verticale paraît plus longue que l'horizontale, alors qu'elles sont physiquement de la même longueur.

 

5) La perspective :
illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion de Ponzo
La verticale de gauche paraît plus longue que celle de droite. Vous vous en doutez, elles sont identiques.

La présence de traits suggérant la perspective entraîne des illusions de grandeur. À même grandeur physique, une forme paraissant plus éloignée qu’une autre sera vue plus grande et inversement. On a tenté de généraliser ce principe à plusieurs illusions. Ainsi, l’illusion de Ponzo (à gauche), qui pourrait être également considérée comme une illusion de mise en relation de grandeur, est fréquemment expliquée par un effet de perspective.
Autre exemple (à droite).
Ceci est un coup de la perspective, renforcé par le damier car on estime la taille des traits noirs par rapport aux carreaux.

illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion à damier
La verticale noire de droite paraît plus longue que celle de gauche. Biensur elles sont identiques.

 

6) La division de l'espace :

illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion d'Oppel-kundt
La distance entre A et B paraît plus longue que la distance entre B et C.

Un espace qui est divisé ou occupé par de nombreux éléments apparaît généralement plus grand qu’un espace qui ne l’est pas.

L’exemple typique est celui de l’illusion d’Oppel-Kundt.

 

7) Les illusions de couleurs :

illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion de couleur
Les deux carrés rouges semblent de nuances différentes mais ils ont exactement la même couleur.

illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion de dégradé
Le batonnet est composé seulement d'une nuance de gris.

Les illusions de couleurs sont très nombreuses et très impressionnantes. L'illusion de couleur de gauche montre bien ce phénomène. Ce sont les couleurs d'arrière plan qui vont influer sur l'illusion, en effet, la lumière dépend non seulement de l'intensité lumineuse de l'objet lui-même mais aussi de son environnement (contraste de surface). Le cerveau distingue les couleurs par rapport au milieu environnant ainsi le blanc semble accentuer la nuance du carré de gauche et le rouge foncé semble diminuer la nuance du carré de droite. Et c'est la même chose pour l'illusion de dégradé en bas à gauche, le noir eclaircit le gris alors que le blanc semble l'accentuer.

A droite nous voyons des taches grises entre les carrés noirs, ce phénomène découvert il y a plus de 100 ans est désormais un classique. Mais d'où sortent les taches grises ? C'est le même principe ; le cerveau adapte l'information concernant la luminosité d'une zone en fonction des zones voisines ainsi vous voyez le blanc moins lumineux car il est entouré de plus de blanc que les lignes, donc vous le voyez legerement gris. Par contre lorsque vous regardez fixement une intersection, elle vous parait blanche car vous faites intervenir les cellules de la fovéa, la zone centrale de la rétine, qui, elle, fait beaucoup moins de correction par rapport à l'environnement.

L'inverse est également possible, on voit du gris entre les carrés blanc, mais cette fois ci on n'en voit pas autour du carré central à sa gauche; tout simplement parce que nous avons rajouté un point blanc afin qu'il n'y ait pas trop de noir par rapport au reste de la figure et ainsi l'information ne traduit par du gris au niveau du cerveau.

illusion © Ophtasurf, 2003
La grille d'Hermann
Nous voyons du gris entre les carrés noirs, pourtant il n'y en a pas.

illusion © Ophtasurf, 2003
La grille d'Hermann
Nous voyons du gris entre les carrés blancs, pourtant il n'y en a pas.

 

8) Les illusions subjectives :

illusion d'optique © Ophtasurf, 2003
Illusion subjective de J.Kennedy
nous voyons un quadrilatère qui n'existe pas : c'est le fruit de notre imagination

Illusion subjective du cube
illusion d'optique © Ophtasurf, 2003

Ce phénomène consiste à percevoir des figures qui se détachent de leur fond bien qu'aucun trait ne soit tracé pour délimiter celles-ci. Ces figures nous paraissent aussi plus claires ou plus sombres que leur fond.
L’illusion est due à une opération mentale de l’observateur, qui prolonge inconsciemment les segments dans la région centrale et recherche un relief.

Il imagine que les lignes se coupent, mais qu’un objet posé sur l’intersection cache cette dernière. Cependant, quand les segments sont inclinés cette opération mentale est moins fondée et l’illusion disparaît (figure de gauche).

illusion d'optique © Ophtasurf, 2003
Illusion subjective de Kanizsa
nous voyons un triangle qui n'existe pas : c'est le fruit de notre imagination

illusion d'optique © Ophtasurf, 2003
Illusion subjective de Kanizsa
nous voyons un cube qui n'existe pas : c'est le fruit de notre imagination

A gauche, nous voyons un cube se détacher très nettement alors qu'il
n'existe pas car notre cerveau a voulu donner une signification précise à ce dessin.

 

9) Les images résiduelles

illusion © Ophtasurf, 2003
Image résiduelle
regardez la bouche de Marylin Monroe (celle qui est rouge) pendant 20 secondes. Ensuite regardez la Marylin Monroe d'en bas, elle semble verte.

Ceci est appelé "image résiduelle". Une image résiduelle est une image qui demeure quand on cesse de regarder un objet. La rétine, située au fond de l'œil est tapissée de cellules sensibles à la lumière colorée : les cônes. Tous ne sont pas sensibles aux mêmes couleurs, certains sont sensibles au rouge, d'autres au vert, et d'autres encore au bleu.

Quand on observe "Marylin Monroe" rouge, les cellules sensibles au rouge se fatiguent et perdent leur sensibilité. Aussi, lorsque l'on regarde le fond blanc en bas de l'image, on la voit verte, car seules les cellules sensibles au bleu et au vert continuent à travailler et qu'elles recréent la couleur dite complémentaire du rouge.

Est-ce que les images résiduelles peuvent être classées parmi les illusions d'optique ? Oui car c'est bien une illusion mais cette fois l'illusion ne se crée plus au niveau du cerveau mais bien dans la rétine...

 

10) Les illusions de mouvement :

illusion © Ophtasurf, 2003
Illusion de mouvement
Le tapis mouvant : Il va se mettre a vibrer et si vous clignez des yeux.

L'oeil humain se fatigue très vite lorsqu'il est contraint de fixer un objet. Si, en revanche, on laisse glisser le regard de l'objet, on évite ainsi de fixer trop intensément et l'image frappe d'autres segments de la rétine disposant de leur pleine capacité.
les muscles de l'oeil permettent non seulement de suivre un objet mais aussi de le percevoir exactement. Il est également prouvé qu'il se produit des mouvements lorsque celui ci fixe fortement un objet. c'est la raison pour laquelle il se produit des mouvement imaginaires.
Les effets de mouvement surgissent au moment où les images rémanantes entrent en conflit avec celles qui sont déplacées du fait des mouvements des yeux.


B) LA PERCEPTION DES ILLUSIONS SELON LES CULTURES :

Les illusions dépendent non seulement de notre système visuel mais aussi de notre culture en général. Ainsi, les européens paraissent avoir une illusion de Müller-Lyer plus forte et une illusion du T renversé moins forte que d’autres groupes ethniques, en particulier africains.

Nous qui vivons en Occident dans un monde oû les formes géométriques avec des angles droits prédominent (immeubles aux lignes perpendiculaires, murs verticaux, plafonds horizontaux ...) avons une très forte tendance à sur-estimer les angles aigus et à sous-estimer les angles obtus, de manière à les ramener à des angles droits. C’est pourquoi nous sommes plus sensibles à l’illusion de Müller-Lyer.

Pour ce qui est de l’illusion du T renversé, une autre explication s’applique. Comme les peuples africains vivent dans la savane, qui a un relief très plat, et que leur environnement est pratiquement dépourvu d’arbres, de maisons ou de poteaux, ils sont donc moins habiletés que nous à juger les lignes verticales ; c’est pourquoi ils sont plus facilement bernés par l’illusion du T renversé.

 

Explications des illusions d'optique artistiques

illusions d'optique artistiques

Illusion artistique
Que voyez-vous sur cette image ? Une jeune fille élégante ou une vieille sorcière ? Essayez de voir les deux :
le menton de la jeune fille correspond au nez de la sorcière, l'oeil de la sorcière correspond à l'oreille de la jeune fille...

Ces illusions ne sont pas des manifestations d'erreurs d’interprétations du système visuel humain mais plutôt la conception de l’oeuvre qui induit notre oeil en erreur.
Il y a plusieurs groupes :
- Un groupe qui illustre l’illusion, les dessins font naître des interprétations visuelles qui sont très différentes des propriétés des éléments représentés.

- Des groupes portant sur l’ambiguïté, chaque dessin peut donner lieu à au moins deux interprétations visuelles qui s’excluent mutuellement. (exemple à gauche). L'observateur peut normalement passer volontrairement d'une interprétation à l'autre, une fois que les différentes interprétations ont été identifiées ainsi que certains indices concernant les différentes interprétations.

- Des groupes sur l’impossibilité, des parties différentes de chacun des dessins suscitent des interprétations incompatibles entres elles. Tous les objets de cette catégorie ne pourraient pas exister ou il serait fortement improbable qu’ils existent dans la réalité. (exemple à droite)


Illusion des colonnes
Combien y a t'il de colonnes ? Difficile à compter, n'est ce pas ?

 

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